Conférence :

 

                        La Prostitution à Gaillac de 1830 à 1946

                                                         par Mr Alain SORIANO

 

          

Sources archives municipales et départementales, témoignages et lectures des auteurs du 19° siècle.

La prostitution existe partout, dans tous les pays, et toutes les époques, l’histoire alterne les périodes de tolérance et de répression. 
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En Grèce Solon lève des taxes sur cette activité qu’il règlemente et dont les bénéfices profitent à la cité.
Le nom d’hétaïre qui indique une prostituée de haut vol est surtout utilisé au XIX° siècle.  
 

          

Au Moyen Age, l’Eglise ferme les maisons closes.
St Louis chasse les filles publiques, mais 2 ans plus tard les ordonnances sont abrogées, pour financer la croisade.
 
Au XVI° la syphilis se répand et devient un problème de santé publique. Lorsque les protestants ont pris Gaillac au XVI° siècle, ils se sont emparés des prostituées et les ont  essorillées.
 
Louis XIV à la fin de son règne l’interdit et enferme les filles à la Salpêtrière.
Louis XV la tolère, le Palais-Royal est un lieu réputé pour la licence qui s’y fait. 
Louis XVI interdit le racolage.  
Napoléon, en 1804 règlemente l’institution des maisons de tolérances. 

Le second Empire et 3° république surtout, constitue l’âge d’or de la prostitution, 200 établissements sont recensés puis 60 en 1944, car le nombre des filles encartées ou isolées augmente pendant toute cette période.  

Les documents d’archives sont rares, les statistiques effectuées pendant cette période étaient laissées à l’appréciation du maire qui à Gaillac, n’a pas jugé bon de signaler une activité que la morale de l’époque réprouvait absolument, (vecteurs de syphilis, immature, la mobilité et le vide d’une cervelle préhistorique, être débile, arrêté dans son développement …..).
De plus les registres des maisons closes se sont perdus et ne sont donc pas aux archives.
Un indice : la rue de la Voulte s’appelait la rue chaude.
 
 En 1830 officiellement on recense entre  30 000 et  500 000  personnes vivant de la prostitution en France, se répartissant entre la capitale, les ports et les villes frontières.
Gaillac est une sous préfecture jusqu’en 1926, il n’est pas fait mention de cette activité dans les registres statistiques or c’est le premier port régional jusqu’à l’arrivée du chemin de fer.
 

 La maison doit être obligatoirement un vieil immeuble qui ne se distingue pas dans le tissu urbain avec un gros numéro et les volets fermés, avec une lanterne rouge allumée dès la tombée de la nuit, tenue par une femme sous la signature du mari, loin d’une église, temple ou école et bâtiment officiel. La responsable qui est souvent une ancienne prostituée  tient un registre ou sont consigné entre autre les visites médicales obligatoires. Il y en a pour tous et toutes les bourses, une maison dernier étage, maison avec estaminet, maison de quartier, maison de débauche plus achalandée.
 
Activité très rentable, publicité sous le manteau « le guide rose », indique les maisons, cartes indiquant les maisons de société  avec des noms imagés "les hirondelles, maison de société".
 
Les artistes sont très indulgents, de Maupassant « Boule de Suif » à  Toulouse Lautrec, jusqu’à Picasso avec ses « demoiselles d’Avignon » qui est le nom d’une maison à Barcelone etc..
 
Souvent les filles sont  issues de la petite bourgeoisie, âgées entre 21 et 25 ans, beaucoup ne savent pas lire. En gros la moitié sont illettrées, exercent de temps en temps des petits métiers (Zola : Au bonheur des dames).
 
Une fois en maison elle est exploitée par la tenancière qui lui vend à prix prohibitifs ce dont elle a besoin. Exemple, chemise de soie 190frcs conte 25frcs en magasin.


Seules subsistent quelques notes dans les archives, en 1832 des interdictions de manifestations pour le carnaval, des rixes et du tapage nocturne, des mentions de souteneurs dans l’épisode la bande à Mina, (Monarchie de Juillet 1830) une mention d’une  « vénérienne » envoyée à l’hôpital, meurtre d’une prostituée…  Dans le quartier de la gare des citoyens signent une pétition contre l’édification d’une maison close.  
Fille de joie, en circulation, et pierreuse (sur les fortifications qu’on est en train de démolir à Paris) sont des synonymes.
 
A Gaillac en 1924 ouvre de façon non officielle « La maison jaune », une  grande maison avec 5 chambres, rue de la grand-côte au quai St Jacques, En 1930 le maire donne  une autorisation orale. Lors d’une perquisition, il reste une description des lieux, une porte avec un judas, deux filles attablées avec des consommateurs, conclusion de la visite des gendarmes : c’est bien une maison close.
Jean Calvet, maire de Gaillac donne une autorisation écrite antidatée, ainsi en 1941 il n’existe officiellement qu’une seule maison.
En 1945 il faut fermer les établissements  de ce type mais ce ne sera effectif qu’en fin d’année 1947.
 
Le Pavillon Bleu, la 2° maison connue de Gaillac qui a été auparavant un restaurant, est  un peu retiré route d’Albi, cette maison ouvre  en 1932 officiellement, d’après l’enquête la tenancière est passé en correctionnelle pour incitation de mineure à la débauche, l’établissement ferme en 1941 sans réouverture officielle.
Pour cause de tapage et d’agitation sur le chemin retiré qui y mène, les voisins se plaignent au maire Mr Calvet, sans réponse de sa part ils écrivent au ministère qui interdit l’accès à l’établissement.
Différentes plaintes soulignent le manque d’hygiène et de probables infections de MST.
En conclusion si les artistes chansonniers, peintres et auteurs décrivent ce monde avec indulgence, pendant la période étudiée, on voit bien l’hypocrisie de la société qui réprouve une activité qu’elle fait plus que tolérer.

  
De nos jours encore c’est une activité qui génère un chiffre d’affaire important et qui malgré les différentes lois répressives et l’interdiction  est toujours en plein essor surtout depuis l’avènement d’internet.
 

 

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